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Un accommodement déraisonnable ? : une explication de la survie des organisations fascistes d'Adrien Arcand pendant l'entre-deux-guerres

Tremblay Jonathan. (2014). Un accommodement déraisonnable ? : une explication de la survie des organisations fascistes d'Adrien Arcand pendant l'entre-deux-guerres. Mémoire de maîtrise, Université du Québec à Chicoutimi.

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Résumé

Comme de nombreux auteurs ont déjà traité de la carrière politique et journalistique d'Adrien Arcand de 1919 à 1967, nous avons décidé de nous concentrer sur deux aspects importants négligés jusqu'ici par les historiens : l'évolution de sa pensée du nationalisme vers le fascisme et ses stratégies politiques électoralistes. Adrien Arcand n'a pas toujours été fasciste. Il l'est devenu en trois étapes dans son cheminement idéologique personnel. Il est tout d'abord un nationaliste canadien français de 1919 à 1930. Puis, lorsque la Loi sur les écoles juives est adoptée en 1930, Adrien Arcand s'oppose avec véhémence à ce projet de loi. Il va s'inspirer des auteurs antisémites britanniques Henry Hamilton Beamish, Arnold Spencer Leese, lord Sydenham of Combe et Oswald Mosley pour trouver des arguments en vue de s'opposer à la création d'un réseau scolaire juif au sein du système éducatif québécois. Aussi, de 1930 à 1932, Adrien Arcand franchit la deuxième étape de son cheminement politique en ajoutant des éléments antisémites à son programme nationaliste canadien-français. Le journaliste Arcand estime par la suite que les nationaux-socialistes allemands constituent la seule formation politique ayant suffisamment de puissance et de volonté pour mettre en branle ses idées antisémites. Il entreprend donc de fonder un parti politique pour incarner ses nouvelles idées antisémites et désormais nazies. C'est ainsi qu'il met sur pied le Parti national social chrétien (PNSC) en 1934 et le Parti de l'unité nationale du Canada (PUNC) en 1938. Cela marque la troisième et ultime étape dans le cheminement idéologique d'Adrien Arcand. En effet, jusqu'à sa mort en 1967, il sera prêt à tout pour mener sa campagne antisémite et fasciste. Il livrera notamment des matériaux de propagande étrangers par la poste, en plus d'ordonner à ses partisans de se livrer à des exercices paramilitaires et d'apposer des autocollants en forme de svastika sur les vitrines des magasins juifs. Pendant ce temps, les agents de la GRC et le gouvernement fédéral refusent de procéder à la dissolution du PUNC, même s'ils savent pertinemment qu'Arcand et ses hommes sont en train de commettre tous ces gestes illégaux. Pourquoi refusent-ils de le faire? Des historiens ont tenté de répondre à cette question en affirmant que le gouvernement ne voulait pas procéder à la dissolution du PUNC afin de respecter les droits fondamentaux des citoyens. En effet, les autorités policières et gouvernementales, ne souhaitaient pas prendre le risque de porter atteinte aux libertés de réunion, d'expression et d'association en réprimant un mouvement fasciste somme toute marginal. Le gouvernement ne voulait pas non plus faire d'Arcand un martyr en l'arrêtant. Enfin, affirment d'autres historiens, le gouvernement fédéral et les agents de la GRC estiment durant les années 1930 que les organisations communistes constituent la principale menace à la sécurité collective des Canadiens et à la stabilité du système parlementaire national. Ils tolèrent donc les mouvements fascistes dirigés par Adrien Arcand, car ces derniers combattent avec la plus grande énergie l'ensemble des organisations communistes au pays. Ces réponses nous permettent en partie de comprendre pourquoi le gouvernement fédéral et les agents de la GRC ont permis à Arcand de commettre tous ces gestes illégaux. Nous allons pour notre part tenter d'apporter une autre explication en vue de compléter ces réponses : les politiciens ont toujours toléré les agissements illégaux d'Adrien Arcand, car ce dernier leur a rendu de grands services durant plus de trois décennies. Arcand a en effet été tour à tour l'un des organisateurs électoraux du Parti conservateur du Québec (1929-1930, 1932-1935), du Parti libéral du Québec (1930-1932), de l'Union nationale (1935-1967), du Parti conservateur du Canada (1930-1933, 1935 et de manière épisodique par la suite) et de plusieurs formations créditistes après la Seconde Guerre mondiale. Cependant, plusieurs groupes au sein de la société civile canadienne s'inquiètent de la présence des disciples d'Adolf Hitler au pays. Tout d'abord, les Juifs combattent dès 1930 les troupes d'Arcand, car celles-ci manifestent bruyamment leurs sentiments antisémites. Également, pour des raisons purement idéologiques, les communistes s'opposent au programme fasciste d'Adrien Arcand. Toutefois, ce dernier doit affronter l'opposition d'un nombre encore plus grand de personnes lorsque des journalistes commencent à publier à la fin des années 1930 des reportages qui démontrent clairement le soutien manifesté par les disciples d'Arcand à l'égard du régime allemand. Ces reportages suscitent une grande crainte au sein d'une partie importante de la population, surtout à partir du moment où le gouvernement canadien déclare la guerre à l'Allemagne le 10 septembre 1939. Un peu partout au pays, des bandes de citoyens armés se regroupent au sein d'une milice afin de veiller à ce que les partisans d'Arcand ne commettent pas des actes de sabotage en vue d'aider l'armée allemande à envahir le Canada. Pendant ce temps, plus de 10 000 personnes manifestent sur la colline parlementaire à Ottawa afin de demander au gouvernement fédéral de procéder à la dissolution des mouvements fascistes canadiens. Finalement, pour éviter que des gens ne se révoltent après avoir constaté qu'Adrien Arcand peut mener en toute impunité une campagne politique en faveur d'une puissance ennemie en temps de guerre, le ministre fédéral de la Justice Ernest Lapointe se résigne à interner Arcand et vingt-six autres membres du PUNC de 1940 à 1945. Selon nous, c'est surtout grâce à la vigilance de plusieurs groupes au sein de la société civile qu'Arcand a été incarcéré. Ce n'est certainement pas grâce au gouvernement qui permettra à Arcand de recommencer à mener en toute impunité ses activités politiques d'extrême-droite révisionnistes de 1945 jusqu'à sa mort en 1967.

Type de document:Thèse ou mémoire de l'UQAC (Mémoire de maîtrise)
Date:Juillet 2014
Lieu de publication:Chicoutimi
Programme d'étude:Maîtrise en études et interventions régionales
Nombre de pages:244
ISBN:Non spécifié
Sujets:Sciences sociales et humaines > Sciences humaines > Histoire
Département, module, service et unité de recherche:Départements et modules > Département des sciences humaines > Programmes d'études de cycles supérieurs en interventions régionales
Directeur(s), Co-directeur(s) et responsable(s):Claveau, Cylvie
Déposé le:15 juill. 2015 16:41
Dernière modification:14 oct. 2015 00:37
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