Constellation, le dépôt institutionnel de l'Université du Québec à Chicoutimi

Résumé

Afin de mieux cibler la portée et l'efficacité des subventions que l'État québécois consent aux groupes bénévoles oeuvrant dans le domaine de la santé et des services sociaux, il s'est avéré utile d'en rencontrer qui ne bénéficient pas de subsides étatiques. Cette initiative permet de montrer comment ils fonctionnement et quelles sont les réelles répercussions du soutien de l'État de manière à pouvoir apprécier l'écart qui sépare ces deux formes d'exercice du bénévolat. Il convient, en l'occurrence, de se pencher sur les dimensions suivantes : l'évolution des groupes soutenus par l'Église depuis les années quatre-vingt-dix ; les similitudes et les dissimilitudes entre les groupes qui reçoivent un soutien étatique et ceux qui n'en ont pas ; l'influence de l'intervention étatique sur les pratiques de recrutement et d'encadrement des bénévoles. Bref, il s'agit ici de vérifier si le financement étatique fait une réelle différence dans le maintien et la reproduction du bénévolat. Le réaménagement de l'État dans l'espace social a permis de constater qu'il modifie le paysage des groupes bénévoles subventionnés (Robichaud, 1994). Ils adoptent alors une forme de système plus hiérarchique et tendent à se transformer en quasi-appareils (embauche de permanents, spécialisation des acteurs, tendance à l'officialisation, etc.). Ces changements structurels ont des répercussions sur les effectifs bénévoles puisque la majorité des groupes ont connu une diminution de vingt pour cent de leurs membres et que le recrutement pose problème. Mais qu'en est-il du bénévolat non subventionné ? Pour établir des points de comparaison, l'enquête est menée auprès de huit groupes soutenus par l'Église. La stratégie de recherche utilisée repose sur une approche qualitative qui appelle l'interrogation d'une trentaine de personnes (dont douze dirigeantes et dix-huit bénévoles). Pour relier l'observation à l'explication, deux instruments de vérification sont retenus : l'analyse documentaire et l'entrevue semi-dirigée. La vérification des énoncés de recherche que chapeautent les concepts d'institutionnalisation, de quasi-appareil et de désaffection conduit aux résultats suivants. La pratique bénévole soutenue par l'Église est moins sujette à des règles explicites bien que la capacité de résistance varie d'un groupe à l'autre. En effet, face aux appels de plus en plus incessants des institutions publiques et des populations, certains groupes sont passés d'une structure de réseau à celle d'un quasi-réseau pour glisser enfin dans une structure de quasi-appareil. Et qui plus est, la moitié de ces groupes sont confrontés à une diminution de leurs membres. Ce constat soulève d'autres questions. En effet, dans le contexte du virage ambulatoire et du vieillissement de la population, les groupes bénévoles non subventionnés qui œuvrent dans le domaine de la santé et des services sociaux pourront-ils demeurer des réseaux et des quasi-réseaux ou se transformeront-ils tous en quasi-appareils ? En adoptant une structure plus hiérarchique, auront-ils alors la possibilité de préserver les conduites qui les caractérisent : enracinement dans le milieu, gratuité des services, souplesse de l'intervention, non- bureaucratisation du fonctionnement ?