Constellation, le dépôt institutionnel de l'Université du Québec à Chicoutimi

Résumé

Drôle de société que la nôtre, trop mûre (pourrie?) pour être forte, et trop nouvelle pour être fougueuse. Cette époque me semble partager des traits avec le début du XlXe siècle, devant l'éclipsé définitive des vestiges médiévaux et la montée incertaine du capitalisme. "Tout ce qui était n'est plus; tout ce qui sera n'est pas encore", écrivait Musset dans la Confession d'un enfant du siècle. Pas étonnant que la revue Possibles ait repris le thème du mal du siècle et lui ait consacré un récent numéro, et pas étonnant non plus que le même malaise se dégage du numéro portant sur Les intellectuels. Ce curieux de temps correspond à la généralisation de l'échange marchand. Tout est devenu marchandise et le processus s'est étendu à des secteurs que les chantres du capitalisme ne voulaient ni ne pouvaient entrevoir: la connaissance, la culture, l'art, les émotions, les états d'âme, les communications, l'affectivité, tout est devenu prétexte à commerce, vente, profit, panneaux publicitaires, circulaires. "L'intelligibilité de ce que j'écris doit être tenue pour provisoire. Ruiné à mesure et, de ce fait, réduit à d'incessantes reprises. Imaginez que la lecture du Banquet ou de la Phénoménologie de l'Esprit soit entrecoupée de réclames commerciales. Rien ne s'approche plus près de la réalité que la caricature de cette image, et l'aliénation a depuis longtemps dépassé les cadres étroits des murs de la manufacture ou de l'usine: elle a pénétré toutes les sphères de la vie sociale, les niches de la vie quotidienne, et les replis de notre cerveau.