Tremblay Andréanne. (2023). Le point de vue des femmes victimes de violence conjugale concernant les services d’aide du CAVAC Saguenay-Lac-Saint-Jean. Mémoire de maîtrise, Université du Québec à Chicoutimi.
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Résumé
Chaque jour, au Québec, des femmes et des hommes sont victimes d’infractions commises dans un contexte conjugal. Ces violences peuvent se traduire de différentes manières (physique, psychologique, verbale, sexuelle, économique), varier en intensité et en fréquence, ainsi qu’évoluer au fil du temps. Les événements que vivent ces personnes engendrent une panoplie de conséquences, notamment des blessures physiques, des atteintes psychologiques, des difficultés sociales et des problèmes financiers. Au Québec, c’est grâce à de nombreuses luttes menées par des groupes de femmes que la violence conjugale a été reconnue comme étant une problématique sociale et pénale au cours des années 1980 (Lavergne, 1998). Ces groupes communautaires sont à l’origine de nombreux changements sociaux, dont le développement de services d’aide pour les personnes victimes de violence conjugale. Vers la fin des années 80, les premiers Centres d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC) ont vu le jour. Aujourd’hui, les différents CAVAC offrent une gamme de services dont les personnes victimes de violence conjugale peuvent bénéficier. Parmi ceux-ci, on retrouve l’intervention post-traumatique et psychosociojudiciaire, l’accompagnement au sein du système judiciaire, l’information sur les droits et recours, l’assistance technique pour remplir divers formulaires, ainsi que l’orientation vers des ressources spécialisées (CAVAC Saguenay-Lac-Saint-Jean, 2022). Cette étude qualitative de type exploratoire-descriptive, privilégiant une perspective bioécologique, vise donc à recueillir le point de vue des personnes victimes de violence conjugale concernant les services d’aide du CAVAC Saguenay-Lac-Saint-Jean. Plus spécifiquement, trois objectifs sont poursuivis : (a) décrire leur point de vue par rapport aux facteurs ayant facilité ou entravé les services d’aide, (b) documenter les retombées perçues par les personnes victimes concernant les services d’aide et (c) identifier les attentes comblées et non comblées des personnes victimes vis-à-vis les services d’aide. Pour répondre à ces objectifs, huit femmes demeurant dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean ont accepté de participer à une entrevue semi-dirigée, réalisée entre le mois de novembre 2019 et celui de décembre 2020. Une analyse de contenu thématique a ensuite été effectuée, en fonction des thèmes et des sous-thèmes préalablement établis. En ce qui a trait aux résultats de l’étude, ceux-ci sont nombreux. D’abord, plusieurs facteurs ayant facilité ou entravé les services d’aide ont été abordés par les participantes lors des entrevues. À ce sujet, les femmes ont rapporté que certaines de leurs qualités ou habiletés personnelles (ontosystème) avaient contribué à faciliter leur parcours dans les services d’aide. Or, un obstacle important lié au chronosystème a été identifié dans les propos des participantes et concerne les expériences négatives vécues, que ce soit avec le CAVAC, la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) ou les instances judiciaires, qui peuvent entraîner une méfiance ou une perte de confiance envers les services d’aide de manière générale ou envers le système de justice. En ce qui concerne les facteurs liés au microsystème, les femmes ont souligné l’influence positive de la présence de soutien social dans leurs parcours. Plus précisément, au niveau du soutien formel, les caractéristiques ainsi que les compétences des différents intervenants impliqués dans le parcours des femmes ont été largement évoquées par celles-ci lors des entrevues et ont certainement un lien avec leur niveau d’appréciation des services reçus. Ces caractéristiques et compétences réfèrent à des dimensions liées à la fois au savoir-être, au savoir ainsi qu’au savoir-faire des intervenants. En ce qui a trait aux facteurs contextuels liés aux services d’aide, qui relèvent également du microsystème, les résultats de l’étude illustrent que la méconnaissance des personnes victimes par rapport aux services d’aide offerts constitue un obstacle à ceux-ci, car cette méconnaissance retarde le recours des personnes victimes aux ressources d’aide. D’autre part, le contexte lié à la demande d’aide, que celle-ci soit volontaire ou non volontaire, influence le parcours des femmes victimes dans les services. Ce contexte peut, entre autres, découler des liens entre les différents organismes fréquentés par les femmes, inclus dans le mésosystème. Finalement, la manière dont le système de justice (exosystème) est dépeint dans notre société, que ce soit par certaines personnes ou par les médias, peut faire obstacle à la demande d’aide chez les femmes victimes de violence conjugale. Dans le même sens, certains obstacles se rattachant au macrosystème ressortent des propos tenus par les participantes, notamment le manque de reconnaissance sociale liée au crime ou rattachée à la forme de violence vécue. Les retombées perçues découlant des services du CAVAC ont été plus difficiles à aborder avec les femmes lors des entrevues. Malgré tout, les résultats de l’étude soulignent que les services d’aide du CAVAC sont associés à des répercussions positives dans la vie personnelle et sociale des participantes, principalement relatives à l’ontosystème et au microsystème. Certaines participantes ont souligné avoir fait des apprentissages et des prises de conscience. Les participantes ont également reconnu l’effet des services du CAVAC sur l’amélioration de leur confiance en elles et leur capacité à exprimer leurs émotions et besoins. Certaines participantes ont aussi noté l’amélioration de la qualité de leurs relations interpersonnelles après avoir bénéficié de services d’aide, notamment dans leur vie conjugale et familiale. Finalement, il a été possible de dégager des propos des participantes qu’elles ont développés un important sentiment de solidarité envers les personnes victimes de violence conjugale. Certaines se sentaient davantage concernées par la problématique, alors que d’autres avaient aussi envie de s’impliquer, afin de sensibiliser la population ou pour faire évoluer les mentalités présentes au sein du système de justice (exosystème) ou encore les valeurs prônées socialement (macrosystème). Cette étude a aussi permis d’identifier différents besoins qui sont présents chez les femmes victimes de violence conjugale, que ce soit pendant la relation dans laquelle elles ont été victimes de cette violence ou après avoir mis fin à celle-ci. Les besoins identifiés ont été regroupés en quatre catégories, selon qu’ils réfèrent : 1) à la protection, 2) au soutien psychosocial, 3) à l’information ou 4) à la reconnaissance. Finalement, les résultats de ce mémoire nous amènent à suggérer certaines perspectives qui pourraient être explorées dans le cadre de recherches futures. En ce sens, l’étude propose des recommandations dans la mise en oeuvre de services destinés aux personnes victimes de violence conjugale. Tout d’abord, en tant que société, il importe de dénoncer toute forme de violence et, pour ce faire, l’éducation de l’ensemble des citoyens au sujet de la violence conjugale est primordiale. Pour les recherches futures, il serait intéressant de s’intéresser au point de vue des hommes victimes de violence conjugale par rapport aux services qui leur sont offerts. D’autre part, l’intervention concertée entre les professionnels qui interviennent en contexte de violence conjugale est à privilégier pour l’avenir, et ce, dans le but de mieux aider, soutenir et répondre aux besoins des personnes victimes de violence conjugale. À la lumière des résultats de cette recherche, mais aussi des statistiques sur l’ampleur de la violence conjugale au Québec, le gouvernement doit investir dans l’offre de services aux personnes victimes de violence conjugale, ce qui permettra entre autres de former davantage de professionnels de différents secteurs qui pourront intervenir auprès de cette population. Finalement, des changements doivent être apportés au sein du système de justice dans le but que celui-ci soit mieux adapté aux besoins des personnes victimes. Pour ce faire, de nouvelles mesures doivent voir le jour. À titre d’exemple, les tribunaux spécialisés doivent être mis en place dans l’ensemble des régions du Québec, et ce, dans les meilleurs délais. L’objectif étant d’assurer un meilleur accompagnement aux personnes victimes de violence conjugale, avant, pendant et après les procédures judiciaires. Par ailleurs, le rôle du travailleur social sera fondamental dans l’accompagnement des personnes victimes dans ces nouveaux tribunaux spécialisés et un atout de taille pour les partenaires judiciaires, tout comme les CAVAC, qui travaillent déjà en étroite collaboration avec le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP).
Type de document: | Thèse ou mémoire de l'UQAC (Mémoire de maîtrise) |
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Date: | 2023 |
Lieu de publication: | Chicoutimi |
Programme d'étude: | Maîtrise en travail social |
Nombre de pages: | 0 |
ISBN: | Non spécifié |
Sujets: | Sciences sociales et humaines > Sciences sociales > Service social et travail social |
Département, module, service et unité de recherche: | Départements et modules > Département des sciences humaines > Unité d'enseignement en travail social |
Directeur(s), Co-directeur(s) et responsable(s): | Pouliot, Ève Flynn, Catherine |
Mots-clés: | services d'aide, travail social, victimes, violence conjugale |
Déposé le: | 21 juin 2023 08:57 |
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Dernière modification: | 21 juin 2023 19:51 |
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